Les Émirats arabes unis représentent un marché stratégique pour les entreprises françaises, notamment dans les secteurs du conseil, du numérique et de l’ingénierie. Pourtant, la facturation à destination de clients émiratis soulève de nombreuses interrogations administratives et fiscales. Entre TVA intracommunautaire, mentions obligatoires et spécificités douanières, les règles diffèrent sensiblement des transactions nationales ou européennes. Comprendre ces subtilités devient indispensable pour sécuriser ses opérations commerciales et éviter tout redressement fiscal.
Le cadre juridique des échanges commerciaux franco-émiratis
Les relations commerciales entre la France et les Émirats arabes unis s’inscrivent dans un contexte de partenariat économique renforcé. Aucun accord de libre-échange spécifique ne lie directement les deux pays, mais l’appartenance de la France à l’Union européenne structure le cadre réglementaire applicable. Les Émirats, quant à eux, développent une politique d’ouverture économique qui facilite les transactions internationales.
Sur le plan fiscal, il convient de distinguer les prestations de services des livraisons de biens. Cette distinction détermine l’application ou non de la TVA française, les obligations déclaratives et les mentions devant figurer sur les factures. Les prestations immatérielles bénéficient généralement d’un régime simplifié, tandis que les livraisons physiques nécessitent une attention particulière aux formalités douanières.
La convention fiscale bilatérale signée entre la France et les Émirats en 1989, révisée en 2011, prévient la double imposition. Elle définit notamment les critères d’établissement stable et les modalités de taxation des revenus professionnels. Cette convention constitue le socle juridique pour déterminer dans quel pays les bénéfices doivent être imposés.
TVA et exonération : comprendre les règles applicables
La question de la taxe sur la valeur ajoutée constitue le premier point d’attention lors de la facturation vers les Émirats. Contrairement aux opérations intracommunautaires, les prestations de services à destination d’un pays tiers comme les Émirats obéissent à des règles spécifiques de territorialité. Le principe général veut que ces opérations soient hors champ de la TVA française.
Pour les prestations de services entre entreprises, dites B2B, la TVA n’est généralement pas applicable dès lors que le preneur dispose d’un numéro d’identification fiscale émirati valide. Le lieu d’imposition se situe alors aux Émirats, où une TVA de 5% s’applique depuis 2018. Cette exonération concerne notamment les services de conseil, d’ingénierie, de formation ou de développement informatique.
Les livraisons de biens exportés hors Union européenne bénéficient également d’une exonération de TVA, à condition de pouvoir justifier de la sortie effective des marchandises du territoire communautaire. Les documents douaniers d’exportation constituent la preuve indispensable pour légitimer cette exonération. Pour naviguer sereinement dans ces mécanismes complexes, vous trouverez plus de détails ici sur les démarches pratiques à suivre.
Les mentions obligatoires sur vos factures internationales
Informations essentielles à faire figurer
Une facture destinée à un client émirati doit respecter un formalisme précis pour être considérée comme valide tant en France qu’aux Émirats. Au-delà des mentions habituelles, certaines spécificités s’appliquent aux transactions internationales. Voici les éléments indispensables :
- Identification complète des parties : raison sociale, adresse complète, numéros d’identification fiscale (SIREN pour la France, TRN pour les Émirats)
- Numéro de facture unique : suivant une séquence chronologique ininterrompue, conformément aux obligations comptables françaises
- Date d’émission et date d’exécution : de la prestation ou de la livraison, permettant de déterminer le régime fiscal applicable
- Description détaillée : nature précise des prestations ou produits fournis, avec quantités et prix unitaires en toute transparence
- Montant total en euros : ou dans la devise convenue, avec mention du taux de change applicable le cas échéant
- Mention d’exonération de TVA : avec référence à l’article 259-1 du Code général des impôts pour les prestations de services internationales
- Conditions de paiement : délai, moyens acceptés et éventuelles pénalités de retard conformément à la législation française
La facture doit être rédigée en français, mais une version bilingue français-anglais facilite considérablement les relations commerciales avec les Émirats. L’anglais constituant la langue des affaires dans la région, cette traduction évite les malentendus et accélère les processus de validation interne chez votre client.

Démarches administratives et déclarations fiscales
Bien que les prestations vers les Émirats soient exonérées de TVA, elles doivent néanmoins être déclarées auprès de l’administration fiscale française. La Déclaration européenne de services (DES) ne s’applique pas aux pays tiers, mais ces opérations figurent sur votre déclaration de TVA habituelle, en ligne 06 pour les livraisons hors UE ou en ligne 13 pour les prestations de services internationales.
Les entreprises françaises doivent tenir une comptabilité rigoureuse de ces opérations internationales. Les factures émises vers les Émirats sont enregistrées en chiffre d’affaires hors taxes, sans collecte de TVA. Cette particularité implique une vigilance accrue lors des déclarations mensuelles ou trimestrielles de TVA pour éviter toute erreur de saisie.
Sur le plan douanier, les exportations de biens nécessitent une déclaration d’exportation via le système DELTA. Ce document électronique permet le suivi des marchandises et constitue la preuve d’exportation justifiant l’exonération de TVA. Les transitaires spécialisés dans les échanges avec le Moyen-Orient peuvent faciliter ces démarches pour les entreprises peu familières des procédures douanières.
Encaissement et gestion des risques financiers
L’encaissement des paiements depuis les Émirats requiert une attention particulière aux modalités de transfert international. Les virements SWIFT constituent le moyen le plus courant, avec des délais de traitement de 2 à 5 jours ouvrés. Les frais bancaires, partagés entre émetteur et bénéficiaire, peuvent représenter entre 15 et 40 euros par transaction selon les établissements.
La couverture du risque de change mérite réflexion lorsque les montants deviennent significatifs. Le dirham émirti étant indexé sur le dollar américain, les fluctuations EUR/USD impactent directement la valorisation des factures libellées en dirhams. Des instruments de couverture comme les contrats à terme permettent de sécuriser la marge commerciale sur les grands contrats.
Le risque d’impayé ne doit pas être négligé malgré la réputation de solvabilité des entreprises émiraties. Une assurance-crédit export peut s’avérer judicieuse pour les transactions importantes ou les relations commerciales naissantes. Bpifrance Assurance Export propose des solutions adaptées aux PME françaises exportatrices, avec des garanties couvrant jusqu’à 95% du montant des créances.
Les délais de paiement aux Émirats oscillent généralement entre 30 et 60 jours, parfois davantage dans certains secteurs. Anticiper ces délais dans votre trésorerie et prévoir des relances structurées constitue une bonne pratique. L’insertion de clauses de pénalités de retard sur vos factures, bien qu’optionnelle dans les relations internationales, peut dissuader les retards de règlement.

L’essentiel à retenir
Facturer une entreprise émiratie depuis la France combine rigueur administrative et compréhension des spécificités fiscales internationales. L’exonération de TVA simplifie les opérations mais n’exempte pas des obligations déclaratives. La maîtrise des mentions obligatoires, des procédures douanières pour les biens, et la sécurisation des paiements internationaux garantissent des relations commerciales sereines avec ce marché dynamique. Avez-vous vérifié que vos factures respectent bien toutes les exigences légales pour vos clients émiratis ?